D’où vient le temps que la plupart des gens semblent avoir en quantité telle qu’ils peuvent le perdre?
Simplement vivre demande beaucoup de temps…Ce n’est pas une figure de style, un mode de vie simple est un mode de vie… rempli ! Semer, repiquer, glaner, cueillir, cuisiner, mettre en conserve, etc… Le simple fait d’assurer une certaine autonomie et une résilience dans le domaine alimentaire est déjà une tâche immense si on s’y prend consciencieusement. Que dire alors de l’entretien, de l’éducation, de la santé, des déplacements… Des heures et des heures… Des heures heureuses, occupées d’un labeur à la finalité connue et dont on connait peut-être le bénéfice quand on s’engage dans cette voie. Mais des heures tout de même.
S’il fallait travailler pleinement à cette autonomie, qu’il serait compliqué de donner, en plus, 35h à des entreprises ! Qu’il serait rare de dépenser le temps précieux à vérifier pour la 2e (3e, 4e, 5e ?) fois aujourd’hui s’il y a de nouveaux courriels publicitaires qui sont arrivés dans la boîte, qu’il serait impossible de brader 4 heures par jour à la lucarne à temps de cerveau disponible…
Alors d’où vient la profusion de temps qui semble être celle des gens vivants en Monoculture ?
Du pétrole et de l’énergie et que nous payons bien en deçà de leurs valeurs aux pays producteurs d’une part. Un baril de pétrole contient l’équivalent de 3 ans de travail manuel. À 50 dollars le baril, on est loin des 36 mois de SMIC… Et aujourd’hui, en moyenne nous avons chacun 140 « esclaves énergétiques ». Louis XIV n’en avait « que » 50, en chair et d’os certes. Mais que dire des ouvriers pas si lointains que nous employons pas si indirectement sans inclure dans leur salaire la moindre cotisation sociale et tout juste de quoi leur assurer le présent.. ? Le temps qui s’écoule devant des écrans, dans les embouteillages ou à Disneyland, est fourni par ce temps gratuit en conserve que sont les énergies à bas prix et ce temps consommé chez d’autres qui cultivent nos légumes pour presque rien. Ainsi même le moins nanti de par chez nous vole à d’autres pauvres pour donner aux riches…
Mais la considération du temps que nécessite une vie simple amène à une autre conclusion : Dans notre époque post pic pétrolier et climatiquement réchauffée, il y a urgence à s’organiser. Sans quoi, le temps va venir à manquer à chacune et chacun.
La permaculture se définit parfois comme un mode de vie de paresseux malin. Ce n’est pas faux. En cherchant à optimiser l’utilisation des services fournis gratuitement par la Nature en favorisant les interactions permettant à ces services de se réaliser, elle diminue le travail produit au strict nécessaire. Qui est déjà très conséquent. Cela demande réflexion, planification. C’est une organisation.
Mais il semble important d’insister sur l’aspect collectif que cette organisation urgente requiert. L’autonomie et le résilience doivent se cultiver au niveau des groupes de vie, y compris urbains. Car nous n’avons pas les mêmes goûts, les mêmes possibilités ni les mêmes connaissances. Là où l’un excellera dans la réparation et la durabilité des objets, une autre sera maîtresse au jardin tandis que d’autres soigneront. Les métiers, l’entraide, la résolution par le collectif des problèmes individuels ont encore de beaux jours devant eux…
N’en déplaise aux bénéficiaires de notre temps volé.